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Expulsion de l'artiste iranien Alborz Teymoorzadeh

Pertinence du ministre de la Culture: une question cruciale

Dans un article du Luxemburger Wort, Marc Thill, le chef de la rédaction culturelle, revient sur l'expulsion sans scrupules de l'artiste et architecte iranien Alborz Teymoorzadeh.

▲Au Luxembourg, l'art et la culture ne sont tolérés que s'ils génèrent une plus-value pour l'économie. Image : stern.de
▲Au Luxembourg, l'art et la culture ne sont tolérés que s'ils génèrent une plus-value pour l'économie. Image : stern.de

Alborz Teymoorzadeh a été dégagé du pays parce que son travail dans la photographie et l'architecture ne rapportait pas de blé pour l'économie luxembourgeoise. Et qui était aux abonnés absents à la table des négociations ? Eh oui, le ministre de la Culture ! Peut-être que notre ministre était trop busy avec tous les biennales d’art, salons du livre, festivals du théâtre et du film auxquels il se rendait.

Eh bien, on a pigé quelque chose : pour le nouveau Luc, la culture doit cracher du pognon, elle doit être rentable, elle doit rapporter des pépettes, elle doit générer une plus-value pour l'économie nationale. Sinon, elle n’a rien à faire dans notre société.

Voici donc l'éditorial de Marc Thill du Luxemburger Wort, que j'ai librement traduit en français.


Début de la traduction

Éditorial

Pertinence du ministre de la Culture : une question cruciale

Si la culture n'est pas représentée à la table des négociations lorsque le destin d'un artiste est discuté, alors l'existence même d'un ministre de la Culture est remise en question.

Quelle est la véritable importance sociale de la culture ? L'expulsion récente de l'artiste iranien Alborz Teymoorzadeh, après le rejet de sa demande de statut d'indépendant, soulève cette question fondamentale. Jugé sans intérêt économique pour le Luxembourg dans les domaines de la photographie et de l'architecture, Teymoorzadeh a été écarté par une commission consultative où tous les ministères clés étaient représentés - sauf celui de la Culture.

La scène culturelle luxembourgeoise a désormais une vision claire de l'estime que lui porte le gouvernement : fort peu. Eric Thill, ministre de la Culture, peut bien continuer à parcourir le monde pour assister à des salons du livre, biennales d'art, festivals de cinéma et de théâtre, et y féliciter les artistes pour leurs réalisations. Mais une chose reste inchangée : si la culture n'a pas voix au chapitre lorsqu'il s'agit du sort des artistes, alors le ministère de la Culture devient superflu. Et si la culture est considérée uniquement comme une marchandise parmi d'autres, autant transférer la gestion culturelle au ministère de l’Économie et des PME.

La dernière remise en question de l'importance de la culture dans notre pays remonte à la crise sanitaire du Covid-19. Pour enrayer la propagation du virus, les établissements culturels ont dû fermer leurs portes, se pliant à cette nécessité. Ils ont néanmoins constaté avec stupéfaction que les dimanches d'ouverture des magasins avant Noël avaient plus d'importance pour les Luxembourgeois que les scènes et les salles de concert. Les commerces ont pu ouvrir leurs portes malgré les risques élevés de contagion, tandis que les lieux culturels devaient rester fermés. Art et culture n'étaient plus vus comme des fleurons nationaux ou des réconforts pour l'âme, mais comme secondaires, contrairement au commerce et à l'économie.

L'artiste iranien, qualifié de "inutile", a quitté le pays il y a deux semaines. Pourtant, la culture est précisément "la conquête de l'inutile", ce qui la rend précieuse et parfois difficile à comprendre. Oui, même l'inutile peut avoir de la valeur - ce n'est pas une contradiction ! Comme l'illustre Werner Herzog dans son film "Fitzcarraldo". Dans cette œuvre, Klaus Kinski incarne un rêveur qui pénètre l'Amazonie pour devenir riche et réaliser son rêve de construire une opéra au cœur de la jungle. Ceux qui, comme lui, vivent avec Caruso et Verdi, trouvent leur place même dans la nature sauvage.

Il en va de même pour Alborz Teymoorzadeh. Dans une lettre ouverte au Premier ministre Luc Frieden, il affirme qu'on se souviendra de lui comme artiste visuel iranien. Quant au Premier ministre, il restera en notre mémoire pour son absence de contribution au développement culturel du Luxembourg.

Fin de la traduction


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